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À Bougival, non loin de chez nous, vivait l'une de mes amies d’Université qui avait épousé le plus jeune des trois fils d’un couple d’Espagnols, ayant fui leur pays à la fin de la guerre d’Espagne.
Les parents s’étaient rencontrés dans des camps de transit, et avaient décidé de rallier ensemble la région parisienne.
Le père, artiste, ouvrier pour survivre, avait croqué ses compagnons d’infortune dans ces camps de l’exode. Il nous montra tout un carton plein de c(s) es souvenirs.
Ils organisèrent un grand pique nique au bois de Saint Cucufa. Avec ma caméra, je filmai cet instant et soudain, un regard de bête traquée dans le champ de visée ; un couple de réfugiés politiques argentins qui venait d’arriver; réagissant instinctivement, épidermiquement, avait oublié, une fraction de seconde, que nous pique- niquions, entre amis, aux portes de Paris, par une douce journée d’été.
Je revis les beaux-parents de mon amie des années plus tard ; après que Franco eut passé le pouvoir au nouveau roi d’Espagne. Ils avaient le sentiment d’avoir perdu leur vie, l’impression d’avoir été floués par l’histoire. Surtout que, pour aller jusqu’au bout de leurs convictions, ils avaient refusé d’acquérir un quelconque bien ; attendant « le grand soir » où tout devrait être redistribué selon les besoins de chacun.
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