Un été à L’Isle Adam et Le Jardin des cinq sens par Jacques Taurand
Aux Editions de Saint Mont.
L’auteur vécut de 1936 à 2008, et fut Adamois de 1994 jusqu’à sa mort. Si Jacques Taurand a excellé dans divers genres littéraires, c’est certainement parce qu’il se les appropriés tous. Selon lui, l’angoisse de la page blanche ne se produit que lorsqu’on se force à écrire alors que l’on n’a rien à dire.
Sa veine poétique et satirique s’inspire de la réalité et de la vie quotidienne. Bien qu' ayant vécu autrement que par son Art, il fut très prolifique. Son ouverture d’esprit, universelle, le fit apprécier par exemple par Mohammed Dib, qui publia des fragments de sa Nouvelle Un Dimanche dans la revue Algérie Littérature N°85/86 en nov.2004 ; ou encore par Jacques Rabemananjara, ex Vice-président de Madagascar, l’un des chantres de la négritude qui préfacera son second recueil Paroles d’Eau.
On dit Jacques Taurand héritier de l’Ecole de Rochefort, » qui fut animée par Jean Bouhier, René Guy Cadou, Luc Mérimont, Jean Rousselot et Michel Manoll ; Ecole empreinte du mot « liberté »
Le livret de ses deux Nouvelles, Un Eté à l’Isle Adam suivie par Le Jardin des cinq sens semble, à première vue un simple guide touristique, pouvant intéresser des visiteurs de passage. Mais, en nous y plongeant, nous nous voyons entraînés dans un Monde onirique et fantasmagorique où le rêve et la réalité sont étroitement entremêlés. Il nous narre comment avec l’intention d’acquérir un bonheur-du-jour, il se rend à la Salle des Ventes de l’Isle Adam, où il est distrait par la mise aux enchères d’une photographie de Gérard de Nerval , signée par Nadar, sur laquelle il décide d’enchérir. Puis comment il est entraîné par l’acquéreuse finale, Sylvie de Maulnaye, dans un Monde parallèle insoupçonnable. Ils se dirigent vers l’Auberge du Cabouillet, où ils s’attablent. Et là, elle lui fait une invitation étonnante : rencontrer chez elle, dans son château situé dans les hauteurs de L’Isle Adam, Gérard de Nerval lui-même. Nous voilà embarqués malgré nous dans un Monde enchanté, mais qui semble pourtant si proche de la réalité. Nous chercherons ensuite l’Auberge des Trois Anneaux près de la place du petit Martois à Pontoise où elle se trouvait jadis et où il ne subsiste plus que les trois anneaux. Un enfant rouquin, vêtu de vêtements anciens, bien que neufs, juché sur une bicyclette d’un autre âge mais en parfait état m’indiquera l’endroit, face à l’église, que je ne trouvai point, bien que je lui prétendis le contraire alors que je m’en allai. Puis le Jardin des Cinq Sens, en face du Musée Pissarro, sur les contreforts de Pontoise, où désirant m’y rendre y entraînai mon mari, une amie ainsi que sa mère. Sur un banc jouant avec un chat noir, comme s’il était chez lui un homme d’âge moyen aux vêtements intemporels me sourit. J’interpelai mes compagnons de promenade et leur demandai de se souvenir du visage de cet homme. Une fois rentrée je leur montrai un portrait de Gérard de Nerval. Ils crurent tous à une imposture ou à une blague concoctée de longue date. Me suis-je noyée dans Jacques Taurand à en perdre la raison ? Nul ne le saura jamais !
Ce livre est à lire par tous les rêveurs, les amateurs d’histoires fantastiques, qui semblent croire que la réalité nous propose plus que nous n’acceptons de voir . Ou Jacques Taurand a-t-il simplement ouvert les portes d’un Monde parallèle qui m’a engloutie.
Chantal Sayegh-Dursus