Non loin de chez elle, mais le long de la route nationale cette fois, elle avait d’autres amis, comme une petite fille d’un an son aînée dont elle avait fait son modèle.
En effet, contrairement à elle, cette dernière avait de longs cheveux épais, retenus par deux longues tresses qui lui descendaient jusqu’au dos, alors que ses petites nattes maigrelettes n’arrivaient elles qu’aux épaules. En outre, cette enfant était de constitution nettement plus robuste que la sienne.
Comme son père travaillait encore à l’époque au Port-Louis et qu’il ne revenait chez eux que le week-end, sa mère allait parfois rendre visite aux parents de cette dernière ; qui étaient eux aussi enseignants. Ce qui se passait généralement le jeudi après-midi ; jour de congé à cette époque pour scinder la semaine scolaire.
Ils étaient alors reçus sous un immense amandier, qui se trouvait à une extrémité de la pelouse de devant.
Ces après-midi-là, elle et son amie s’exerçaient à la fabrication de parfum à partir d’alcool médicinal et de fleurs d’ylangs-ylangs, ou encore faisaient des colliers avec des graines de Job, qu’elles peignaient ensuite. Parfois quand elles en avaient, les graines de lychees évidées servaient à l’élaboration de petites pipes dont les manches étaient des bâtons d’allumette.
Les aînés, des garçons, installés sur la galerie de devant, s’appliquaient, eux, à la construction de modèles réduits d’avions, avec des boîtes de conserves, en s’aidant de maquettes. Quand ils étaient terminés ils les peignaient minutieusement avec une peinture brillante.
Admirative devant la minutie et la beauté de leur petite flottille, elle leur faisait jurer qu’un jour ils lui en offriraient un exemplaire. Ce qu’ils lui promettaient généralement en riant.
Parfois les frères de sa camarade, qui étaient cinq, partageaient aussi leurs jeux, mais cela était plus violent. C’est ainsi qu’un jour elle reçut dans l’œil une petite bille de pistolet à air comprimé.
Il y avait bien un frère du même âge qu’elle, mais il la regardait avec méfiance, car ses aînés, pour le taquiner, les appelaient tous deux les fiancés. Il est vrai qu’ils se ressemblaient énormément et étaient de même constitution.
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